Naëlla Ka'lion

Si on avait demandé à Naëlla ce qui avait fait la fortune familiale dans l'enclave d'Ebris, sans doute elle aurait eu bien du mal à répondre. Elle n’en savait pas trop sur les occupations de son père, et à vrai dire, cela ne l’intéressait pas réellement. Non, ce qu’elle appréciait, elle, des œuvres de son paternel étaient les étrangetés qui atterrissaient parfois chez elles, ou les récits des voyageurs lorsqu’après avoir bu suite à une réception, ils se délestaient d’histoires fantastiques et bien évidemment exagérées, mais tant pis, elle en rêvait quand même! Et des voyageurs… il y en avait de toute sorte… surtout des hommes, uniquement des hommes même… tristement.

L’importation et l’exportation était un art dont les subtilités échappaient donc totalement à la jeune rouquine, seule fille d’une nombreuse fratrie. Sa mère était décédée en lui donnant naissance et la femme qu’avait ensuite pris son père s’était rapidement lassée d’elle comme l’enfant préférait de loin aller jouer dans la boue que chanter ou apprendre à manier le métier à tisser. Elle était donc devenue à force quelque peu garçonne, autant dans ses habits que dans ses agirs, et comme son père n’osait la rappeler à l’ordre ou lui dire non en général, plus personne ne sembla s’en soucier après un temps. Elle ne reprendrait pas les affaires familiales après tout, ainsi pouvait-elle profiter d’une vie plus que facile et dépourvue de soucis sans qu’on ne l’ennuie. Oh bien sûr, il y eut des crises, des prises de têtes et autres petits évènements, mais en général, la jeune femme pu s’épanouir, à sa façon bien unique, insouciante ou du moins ignorant volontairement la réalité qui un jour devrait la rattraper.

Après tout l’adolescence la rappela pour une première fois au sexe qui était le sien. Ses seins gonflèrent alors pour ne plus lui permettre de passer pour autre chose que la jeune femme qu’elle devenait. Ses hanches s’élargirent, ses fesses prirent un joli croquant et… elle saigna. Sa belle-mère s’était moquée de son ignorance quand le prêtre guérisseur l’avait reconduite à elle, alors que Naëlla pensait qu’elle s’était blessée gravement et qu’elle allait assurément décéder, et si c’était la corruption? Si sa belle-mère avait alors peut-être secrètement espéré un retour à la normale pour la jeune femme, elle fut vite détrompée. Lanière de tissus pour écraser la poitrine, vêtement léger et parfois même choquant, la jeune écervelée en ferait à sa tête aussi longtemps qu’elle le pourrait… et les affres du destin passant par une succession difficile au décès de son père lui permit quelques années de grâce.

C’est à travers ces années qu’elle put se perfectionner à l’art du tir à l’arc auprès d’un ancien homme d’arme d'Auvan vivant en marge de la cité. En échange de quelques victuailles qu’elle lui ramenait à chaque fois, il lui prodiguait des leçons autant en matière d'arc que sur la culture et langue de son ancienne Enclave. N’étant plus que l’ombre de l’archer qu’il avait déjà été, et trop éprouvé par ce qu’il avait vu pour être encore efficace à la tâche, au moins pouvait-il transmettre son savoir à la jeune élève. Éventuellement, Naëlla fut même capable d’abattre quelques bêtes de traits précisément placés de même que de tenir une conversation dans cette autre langue.

Le jour vint cependant où on exigea d’elle qu’elle fasse enfin sa part pour la famille. Ses frères qui avaient repris la plupart des affaires de leur père s’étaient finalement intéressés à cette pucelle comme pion dans leur échiquier commercial. Ils ne leur restaient plus qu’à lui trouver un époux digne de ce nom, un qui saurait favoriser le développement de la compagnie Ka’lion. Combien de temps avait-elle encore? Et si elle s’enfuyait et apprenait à vivre pour et par elle-même? Elle pourrait partir à l’aventure? Elle… la suite reste écrire.